Comme tout fan d'orgue, je me suis constitué
une petite collection de CDs dans laquelle j'ai retenu quelques
bons crus. Voici donc mes coups de cur. Vous l'aurez compris : les
critères sont très subjectifs. J'ai rassemblé
ici des disques que j'ai toujours autant de plaisir à écouter
et qui m'ont paru intéressants dans une optique de
découverte de l'instrument et de la richesse de son répertoire.
Cette rubrique est aussi la vôtre.
Vous pouvez
m'envoyer
vos impressions sur des disques que vous aimez particulièrement,
je me ferai un plaisir de les publier !
Le Petit Dictionnaire de l'orgue illustré, Pierre
ROCHAS, Harmonia MundiHMB 590005.06, enregistrements
1965-1997
2CD
/ Pour ceux qui veulent connaître le fonctionnement d'un orgue
et acquérir quelques bases de facture, ou savoir différencier
un orgue classique d'un orgue romantique à travers des exemples
musicaux, pour ceux qui souhaitent avoir un large aperçu de la musique
d'orgue : voici de quoi dissiper tout le mystère qui règne
autour du "Roi des Instruments".
Cela se présente comme un petit livre avec du texte et plein de
photos par P. Rochas, illustré par des morceaux de Bach, Buxtehude,
Couperin, Daquin, Martini, Gabrieli, Walther, Zipoli, Bruhns, Fischer,
Pachelbel, F. Correa de Arauxo, Sweelinck et Widor interprétés
par Saorgin, Chapuis, Rogg, Chapelet, Winter et Pehu. Le premier CD est
un dictionnaire des jeux de l'instrument avec de belles improvisations
de M. Colin.
Tout le meilleur d'Harmonia Mundi sur le sujet.
L'Orgue en Lorraine, J. BIZOT, A.-C. BUCHER, M. CHAPUIS, P.
CAMONIN, J.-P. FETZER, F. MENISSIER, N. PETRY, K617
055, enregistrements 1995
2CD
/ Un magnifique enregistrement pour promouvoir
l'orgue en Lorraine. Cette région est riche en orgues et
pourtant ce patrimoine resta longtemps ignoré. Témoin de
la prise de conscience de la valeur de ce patrimoine, ce disque accompagne
la campagne de "recensement" des orgues lorrains, initiée et menée
par Christian LUTZ.
Ainsi on entendra des organistes lorrains jouer sur des orgues lorrains,
décrits en détail dans le livret. Au programme : Scheidt,
Le Bègue, Balbâtre, Kerll, Buxtehude, Böhm, Bach, Mendelssohn,
Rheinberger, Ropartz, Liszt (un très poétique Orphée),
Karg-Elert (des chorals "néoclassiques" très sympas), Camonin
(improvisation pour un 11 novembre).
On se laissera charmer par toutes ces sonorités riches et variées,
et le tempérament propre à chaque orgue. Superbe !
La Route des Orgues vol. 1 : L'Orgue
Aubertin de Vertus, Olivier
VERNET, Ligia Digital,Lidi 0104043-96, enregistrement
1996
1CD
/ Premier enregistrement du bel orgue
(baroque allemand) Aubertin de Vertus (1996), ce disque se doit donc
en particulier de mettre l'instrument en valeur. Ce qui est fort réussi
: prise de son de qualité, organiste de renom, programme adapté
et varié (et très classique : que des grandes oeuvres très
connues)... Pour l'occasion tous
les maîtres nordiques et allemands se sont donné rendez-vous
: Sweelinck,
Pachelbel (une des plus belles "Chaconne en fa mineur" que j'ai pu entendre),
Bruhns, Buxtehude, Bach (superbe "Toccata, Adagio et Fugue BWV 564" avec
un original écho -bien vu- dans le trait de Pédale), Oley,
Mendelssohn (magnifique "Prélude et Fugue en Ut majeur" joué
façon baroque), Reger, et un français, Jehan Alain. Chaque pièce permet
à l'auditeur de découvrir une couleur particulière
de l'instrument, et pour combler le passionné, les registrations
sont notées.
La Musique d'Orgue Italienne vol. II :"Le Baroque", Massimo NOSETTI, Syrius, SYR 141305, enregistrement
1994
1CD
/ Qui a dit que la musique d'orgue italienne était ennuyeuse
? Heureusement que Massimo Nosetti est là pour prouver le contraire
! tant sont concentrées de scintillantes oeuvres dorées et
ensoleillées dans ce disque consacré au Baroque (XVIIe-XVIIIe
s.). - mais sans Frescobaldi ! - Bon, c'est vrai que les
pièces du XVIIe (dans la première partie) paraissent
un peu austères, hormis une mignonne et fantaisiste Pastorale de
Pasquini et surtout l'alerte "Ballo della Battaglia" de Storace (sur un
éclatant Tromboncini) ! Mais avec les Scarlatti (fin XVIIe-
début XVIIIe s.), cela prend un tour très chouette.
Le père nous éblouit dans sa Toccata XI : Allegro époustouflant,
douce Partita, et Fuga moins stricte que celles de ses prédecesseurs.
Le fils nous offre une Sonata légère et jouant des effets
d'écho. Vient alors Zipoli avec une Canzona dans la lignée
de ses maîtres, une magnifique et méditative "All'Elevazione"
(sur la Voce Humana) alliant grandeur et beauté aussi bien au niveau
de l'harmonie qu'à celui de la mélodie, et un petit bijou
sautillant et croustillant, "Al post Comunio". On aborde ensuite
le XVIIIe s. et le style galant : divertissant et très
théâtral avec ses effets d'écho et ses rythmes vifs
qu'illustre parfaitement le "Presto" en do mineur de Pescetti. Une écriture
parfois simple, mais efficace et prenante comme celle du "Moderato" très
lyrique de ce dernier. Suivent les allegros très brillants et dansants,
et le doux Adagio de Galuppi. La musique religieuse perd ainsi
sa profondeur grande et austère. Elle la retrouve dès 1750
: la "Sonata all'offertorio" de Martini est très solennelle, loin
du style théâtral du début du siècle. Mais pour
finir, M. Nosetti nous joue une Sonata très guillerette d'un jeunot
du début XVIIIes. , Pergolesi, typiquement style galant. Est-il nécessaire
de préciser que M. Nosetti est ici dans son élément,
comme un poisson dans l'eau ! L'orgue de Dardago (1780, 13 jeux, restauré
en 1994) est délicieux et Nosetti nous en fait goûter toutes
les saveurs si italiennes : Tromboncini, Voce Humana, Ripieno... Du fait de la variété
des oeuvres, un disque très plaisant à écouter même
d'une seule traite !
Les Grandes Toccatas, Marie-Claire ALAIN,
Erato 4509-96746-2, enregistrements
1972/76/80
1CD
/ Toutes les plus célèbres
Toccatas qu'on a l'habitude d'entendre à la fin des offices réunies
en un CD !
Tellement célèbres que c'est à elles que pensent la
plupart des gens quand on leur parle du répertoire de l'orgue. Ces
oeuvres imitant l'improvisation, visant à "tester ", toucher -de
l'italien "toccare"- symbolisent l'orgue-roi grandiose, inquiétant,
impressionnant presque écrasant (bien loin des chorals de l'Orgelbüchlein
!) juché sur son piédestal de pierre au-dessus des hommes.
(Et après on se demande pourquoi certains organistes ont la grosse
tête !) Cet orgue grand et sombre, c'est l'orgue symphonique français.
C'est le XIXe s. qui a redécouvert Bach, et formé dans sa
lignée Franck, Widor, Vierne. Et bien sûr, Cavaillé-Coll
a permis à ces auteurs de s'exprimer pleinement.
Aussi retrouvera-t-on avec plaisir Marie-Claire Alain sur les grandes orgues
Cavaillé-Coll
de la Cathédrale d'Orléans (avec sa tonitruante Contrebombarde
de 32' à la Pédale), sur celles de St-François
de Saales à Lyon et sur le Valtrin - Callinet - Schwenkedel
de Belfort. On entendra Bach (Toccata et fugue en ré m) dans l'esprit
XIXe s., Boëly, Dubois, Gigout, Widor, Vierne, Boellmann, Albert Alain,
Franck et Jehan Alain.
Le jeu est d'une grande clarté et les registrations (quoique un
peu similaires) servent à merveille ces grandes pièces. La
Fantaisie en Si b de Boëly, la Toccata en si de Gigout, celle de la
5ème symphonie de Widor et la Pièce Héroïque
de Franck sont remarquables ! On n'en attendait pas moins de "Notre-Dame
de l'Orgue".
François COUPERIN, Messe pour les Couvents, Olivier
VERNET, Schola Grégorienne La Fidelissima, Ligia
Digital, Lidi 0104041-96, enregistrement
1996
1CD
/ Un voyage dans le temps teinté
de spiritualité : voici une messe du XVIIe s. en France reconstituée.
Car, c'est courant depuis un moment : on n'enregistre plus les Messes de
Couperin telles quelles sur un Thierry / Clicquot à la va-vite !
non, il faut graver une messe d'époque (question d'ambiance et de
contexte). On accueillera donc avec joie la Messe
pour les Couvents alternée avec un Ordinaire chanté de
la "Messe Baptiste", ainsi nommée car attribuée à
Jean-Baptiste Lully fils. De plus ces messes deviennent "à la mode"
et les enregistrements et rééditions fleurissent. Résultat
: ces oeuvres de plus en plus travaillées sont ainsi interprétées
de manière presque parfaite.
Personnellement, j'ai un faible pour le disque de O. Vernet et J. Cabré.
Tout d'abord en raison du choix de l'orgue. Celui-ci, abrité sous
les voûtes de l'abbaye de St-Guilhem-le-Désert, est un authentique
témoin du baroque français : un Cavaillé
de 1782 intégralement préservé, cependant resté
inachevé à l'époque (le positif ne reçut sa
tuyauterie qu'en 1984 avec la restauration d'Alain Sals ) ! Bien qu'il
fût construit un siècle après la parution de la Messe
pour les Couvents, il sert admirablement bien celle-ci grâce
à son tempérament inégal prononcé, ses timbres
colorés et surtout sa taille modeste (III,P,27 jeux, pas de 16')
due précisément au fait qu'il appartient à un couvent.
Cet exemple montre bien la constance de la facture d'orgue classique française
aux XVIIe-XVIIIe s. Pour profiter de chaque timbre, les registrations
utilisées sont inscrites dans le livret.
Ensuite, l'interprétation est de qualité : La Fidelissima
dirigée par Josep Cabré, au chant recueilli et pur, alterne
avec Olivier Vernet, vif et pétillant dans ces pages joyeuses. En
effet, ça fourmille d'ornements comme dans le 1er Plein-Jeu
du Kyrie, les Duos sont enjoués, le Dialogue sur la
Trompette du Grand Clavier, sur la Montre, le Bourdon et le Nazard du Positif
est très réussi, de même que la très belle Tierce
en taille de l'Elevation, (bien que je lui préfère celle
interprétée par Chapuis à St-Maximin...).
En résumé : un vrai plaisir.
KREBS, Fantaisies et chorals pour l'orgue et le hautbois,Martin GESTER (orgue), Randall COOK (hautbois), Philippe
SUZANNE (flûte), Adda 581196 ou Accord 242 542, enregistrement
1989
1CD
/ J'ai choisi ce disque avant tout pour son originalité. Au programme
: des oeuvres baroques assez inhabituelles car un peu dénigrées.
En effet, il s'agit de pièces illustrant le courant en vogue en
Allemagne centrale au début du XVIIIe s. : des Sonates pour Orgue
seul ou avec Hautbois, destinées à l'Eglise mais à
la limite du profane. C'est un genre où Krebs, Homilius
et Kauffmann ont excellé. L'idée est d'émouvoir
le fidèle. Ainsi ses trois composantes sont : émotion, simplicité
et naturel.
À cette époque, on travaille aussi à associer l'orgue à
d'autres instruments, de la même façon que le clavecin et
le pianoforte ont bénéficié de ces fructueux mélanges.
Dans les fantaisies, le hautbois est là pour dialoguer avec l'instrument
polyphonique qui joue en Trio formant alors une sorte de Quatuor. Dans
les chorals, il donne du relief à la mélodie par la chaleur
qu'il lui apporte.
À partir de là, naissent de charmantes petites pièces. Comment
ne pas être séduit par la fraîcheur de la Fantasia
à 4 en Fa - Cantabile, la joie majestueuse de "Meinen Jesum
lass ich nicht" pro organo pleno, la beauté nostalgique de la
Fantasia à 4 en fa - Adagio non molto de Krebs ; le doux
lyrisme de "Weg, mein Herz, mit den Gedenken" de Homilius ; la délicatesse,
les jeux d'écho, la similitude entre les timbres dans la Fantasia
à 4 en Ut - Andante (magnifique et certainement la pièce
maîtresse du disque), et la majesté de "Ich ruf zu Dir"
pro organo pleno de Krebs [...] ! Ces oeuvres pleines de charme méritent à être
connues et même reconnues. Le style est peut-être un peu soûlant
au bout d'un moment (c'est pour ça que je déconseille d'écouter
le disque d'une seule traite). Mais chacune des pièces est si attachante
et si divertissante qu'on ne peut ignorer cette production. C'est le genre
de pièces qui s'intègrent parfaitement dans un concert au
programme varié.
Ici elles sont superbement interprétées par Martin
GESTER (orgue), à l'aise et poétique,
Randall COOK (hautbois), nuancé et dont le phrasé
contraste admirablement avec le souffle imperturbable de l'orgue, et enfin
Philippe SUZANNE (flûte), subtil et lyrique. Ce disque est le premier
enregistrement du fameux orgue
Ahrend de Porrentruy (Suisse) construit en 1985 d'après le Gottfried Silbermann de
Glauchau en Saxe. Les registrations sont originales et appropriées,
et on appréciera surtout le dialogue entre le hautbois de COOK et
la Voix Humaine de l'orgue ainsi que la beauté de l'association
des Flûtes avec la flûte de SUZANNE... - Cependant je regrette
la caractéristique instabilité du vent de l'orgue de Porrentruy,
perceptible à travers les "fluctuations" sonores (donnant une impression
d'essoufflement) dans les pièces "pro Organo Pleno". - Toutefois cela
n'enlève rien à la beauté de ce CD.
M. CORRETTE, Concertos pour Orgue et Orchestre, René
SAORGIN, Ensemble baroque de Nice dirigé par G. BEZZINA, Harmonia
Mundi HMA 1905148, enregistrement 1984
1CD
/ Les Concertos pour orgue et orchestre, op. 26 constituent une
« partition qui est sans aucun doute la plus
intéressante de la production instrumentale de Michel Corrette
» (G. Bezzina). En effet, Michel Corrette (1709-1795),
fils de Gaspard Corrette - à qui l'on doit une magnifique Messe
du 8ème Ton -, nous fascine dans ces oeuvres pleines de gaieté
: rythmes entraînants, thèmes simples et joyeux, esprit italianisant...
Sûrement légèrement postérieurs à ceux
de Haendel, ces concertos sont d'une écriture vive et vivante rappelant
cependant plus celle de Vivaldi (cf. les 1ers mouvements des concertos en Ré
majeur et ré mineur), agrémentée de couleurs
bien françaises et d'effets originaux.
Aussi, qui mieux que R. Saorgin et l'Ensemble Baroque de Nice pouvait restituer
ce style français italianisant ? Vitalité et finesse, parfait
! Le tempo est juste, coulant. De plus, le mélange orgue/orchestre
est savamment dosé. Il faut dire que le
Grinda 1791 de l'Escarène (13jeux,I,P) est un magnifique exemple
d'orgue français en territoire sous influence italienne. Ce petit
orgue participe grandement à l'atmosphère chambriste de l'oeuvre.
L'interprétation est superbe, et on ne regrettera pas les charmants
pizzicati dans le dernier mouvement du concerto en Ré majeur, ainsi
que le dialogue flûte et orgue le dernier concerto.
Mais l'emploi du Rossignol et de la Vielle dans le 2ème mouvement
du Do majeur surprend un peu (quoique ces accessoires fussent très
en vogue au XVIIIe s.).
Un enregistrement qui vous réchauffe le coeur et vous remet d'aplomb
dès les premières notes !
2CD
/ Voilà le disque
pour découvrir l'orgue avec Bach (ou Bach à travers l'orgue
!). C'est en fait l'anthologie de la troisième
(c'est-à-dire la plus récente) intégrale de Marie-Claire
Alain. Ce fut mon premier achat dans ce domaine et grâce à
lui, j'ai appris que l'oeuvre pour orgue de Bach ne se bornait pas aux
grandes toccatas... De plus cette intégrale a été
enregistrée sur de magnifiques instruments historiques, ce qui offre
au néophyte une approche attrayante de l'oeuvre. Ainsi on est ravi
par la Toccata et Fugue en ré mineur BWV565 sur le monumental
Müller de Haarlem*, et pareillement par
la Toccata et Fugue du même ton dite "dorienne" BWV538 sur le G.
Silbermann de Freiberg* . Cet enregistrement
réunit également le Concerto transcrit d'après Vivaldi
BWV593 (sur le Kern
de Masevaux -contemporain-), la Sonate en Trio n°3 BWV527(au Schnitger
de la Aakerk de Gronigen), les Toccatas BWV564 (au Müller
de Leeuwarden) & 566 (Freiberg), et les Préludes et fugues
BWV532 (à Alkmaar*) & 547 (au Schnitger
de la Martinikerk de Groningen -lien
vers une photo et
la composition-). Autant dire que c'est un programme très complet,
qui cependant laisse de côté les fameuses pièces comme
les Fantaisies, la Passacaille ou la Canzona... Mais l'absence (très
regrettable) de celles-ci est compensée par une belle sélection
de chorals : chorals tirés de l'Orgelbüchlein, des "18
Chorals de Leipzig", ou encore les Schübler (sur le Treutmann
de Goslar) et des chorals "divers" (mention spéciale pour le
choral "Herzlich tut mich verlangen" BWV727 à Rötha)...
J'ai entendu beaucoup de personnes reprocher à M.-C. Alain sa rapidité
?!! Étant habitué aux interprétations de Michel Chapuis,
Ton Koopman et Olivier Vernet, je trouve que justement M.-C. Alain joue
un peu moins vite que la moyenne. Ceci peut s'expliquer par le choix de
ces orgues vénérables à traction mécanique
un peu dure et surtout par l'acoustique généreuse des églises
qui impose des tempi modérés. Toutefois il est vrai que,
dans l'ensemble, les grands organistes actuels jouent plus vite que Helmut
Walcha, - la référence - !
Bon, si je dois émettre une critique, ce serait plutôt au
niveau registration. En effet, je trouve que les mélanges de M.-C.
Alain sont un peu trop sages, sérieux, presque fades : ils manquent
de couleurs, de variétés, bref, d'un peu de fantaisie. Les
fonds et les pleins jeux, c’est magnifique, mais je suis tenté de
dire qu’il n’y a pas que ça (!) bien que la montre de Leeuwarden
en solo sonne admirablement bien dans l'Adagio de la Toccata BWV564...
D'autre part, en ce qui concerne la corrélation répertoire/orgues
- souvent bonne -, malgré le très beau "Ich ruf zu dir, Herr
Jesu Christ" opposant flûtes et nazard à une Viola di Gamba
(anche très fine) et le scintillant "In dulci Jubilo" BWV608, je
demeure convaincu que le Schnitger d'Alkmaar*
n'est pas le mieux adapté à l'intimité des chorals
de l'Orgelbüchlein...
Reste que ce disque est splendide, et est indispensable à celui
qui ne s'est pas encore lancé dans l'achat d'une intégrale
!
J.-S. BACH, Die Kunst der Fuge / L'Art de la Fugue, Kei
KOITO, Tempéraments TEM 316016/17, enregistrement
1999
2CD
/ Il fallait oser : enregistrer
le sommet de l'écriture contrapuntique allemande sur celui de la
facture d'orgue classique française. Et voilà réunis
les auteurs de l'Art de la Fugue et de l'Art du Facteur d'Orgues*
! Encore une preuve de l'universalité de Bach... On lit sur la jaquette
du disque : « L'écriture limpide de l'Art de la fugue conjuguée
à la clarté sonore et aux couleurs chatoyantes de l'orgue
français. Une conception audacieuse de Kei Koito qui associe le
chef-d'oeuvre de Bach et l'instrument de Dom Bedos de Celles, sommet de
l'art de la facture d'orgue. » Et le résultat est épatant ! Le recueil, a priori
austère, est comme recolorisé ! Les timbres clairs et chaleureux
du Dom Bedos 1748 de l’église Sainte-Croix de Bordeaux (site
de la ville de Bordeaux, page
de la Route des Orgues) restauré par P.
Quoirin lui donnent une nouvelle dimension. Cromornes, cornets,
trompettes y font merveille ! Les pleins-jeux majestueux, et l'exceptionnel
Bourdon de 32' au clavier de Grand-Orgue allié à la Grosse
Fourniture aux rangs de 16' et 10'2/3 fournissent une ampleur, emphase
sonore dégageant l'immensité du génie de ces pages.
De même, le tempérament inégal en fait ressortir les
audaces dans les passages chromatiques. Dans les trios et les
quatuors, Kei Koito (assistée de Kenneth Weiss) fait chanter chaque
voix sur un clavier différent, facilitant la compréhension.
Alerte, émouvante ou solennelle, chaque fugue est jouée dans
un esprit parfaitement en accord avec l'écriture, admirablement
souligné par la registration (notée dans le livret). En somme,
je trouve l’interprétation de Kei Koito remarquable par sa justesse.
Chaque fugue devient un véritable délice ! Le Contrapunctus
IX, alla Duodecima, sur les Grands Jeux m'a subjugué.
F. Chapelet
Vos suggestions :
« [...]
Vincent Warnier (organiste de St Etienne du Mont, à Paris), que j'estime
un très grand interprète de Bach, malgré sa jeunesse ;
écoutez son Orgelbüchlein, empreint d'une intériorité
que je n'ai trouvée nulle part ailleurs, même chez Isoir. »
« chez
Coriolan "Autour de la fantaisie romantique" par Stéphane Bois [...] Cela
vaut bien le détour ! « il y a la collection des
enregistrements de L.Robilliard à St François de Sales qui vaut vraiment le
détour elle aussi, bien que les transcriptions pour orgue demandent pas mal
d'attention de la part de l'auditeur.
Et bien d'autres chef-d'oeuvres encore...
Les symphonies de Vierne et Widor à StOuen, St sernin (Avant
restauration...)et St François par Van Oosten;
Les pièces de Fantaisies par le même à St Ouen;
La transcription des Tableaux d'une exposition de Moussorgski par J.Guilloux
à la Tonhalle [...]
Etc
Rien que de très beaux instruments...
J'allais oublier:
Les pièces baroques par JC. Guidarini à l'institut catholique de
Toulouse... dur à trouver, mérite de faire l'effort. »
Mathieu Delmas
« les
rééditions des enregistrements de Jeanne Demessieux chez Festivo, une
merveille surtout Franck à la Madeleine ! »
« 4 disques
réalisés par André Isoir que je trouve absolument géniaux et
où on sent que l'interprète s'éclate et se laisse aller
... pour le meilleur!
- l'orgue français à la renaissance, sur l'orgue koenig
d'angers et sur une régale il me semble construite par l'interprète.
- l'orgue à la révolution française, avec des live, et
une adaptation très prenante des cloches de Moyreau à Poitiers, ainsi que la
truculente "victoire de l'armée d'italie" beauvarlet-charpentier fils sur l'orgue
superbe de st germain des prés à paris.
- la dynastie des couperin : l'orgue de st michel en thiérarche
y est d'une beauté stupéfiante et Isoir laisse éclater sa verve.
- un noël en champagne : à l'orgue de st brice d'Ay,
[...] un bijou! »
Yannick Merlin
« 2 disques
de chez Coriolan présentant un superbe compositeur Clément Loret.
Il n'est malheureusement pas très connu. Je n'ai sous les yeux que la
référence du Volume 2 : COR 324 803.
Il a été enregistré à la Cathédrale de Carcassonne.
Ce CD renferme quelques petits trésors même s'il fait preuve, parfois,
de la musique à 3 P (Pompeux, Pompier, Poussif). »
«
un coffret assez récent puisqu'il a été publié
en 2000 et qui concerne la Belgique. Il s'intitule "Orgues de Wallonie"
et il a été réalisé par la Commission Royale
avec le concours d'Anne Froidebise [...]
Ce coffret est fort beau et donne une idée très précise des orgues de
la région de Liège que nous ne connaissons mal, nous autres Français,
mis à part les participants du Congrès de la FFAO 97. Il y a dans ce
coffret des enregistrements rares et superbes à la fois qui devraient
combler les collectionneurs autant que les organophiles. » « un disque
reçu tout dernièrement et qui m'enchante [...] :
Susan Landale vient de donner un petit bijou à Calliope "Charles Tournemire
Office de l'Assomption et les Cinq Improvisations reconstituées par
Maurice Duruflé" CAL 9936 avec la participation
d'un Ensemble grégorien qui donne les références de
l'inspiration de l'organiste de Sainte-Clotilde. C'est superbe car
le Cavaillé de l'Abbatiale Saint-Etienne de Caen à lui seul
vaut le détour, la prise de son est fort réussie et Susan
joue magnifiquement cette musique. L'idée d'associer le Plain-Chant
comme on le fait souvent avec les anciens français est évidemment
judicieuse, je pense aussi aux réalisations autour de l'Orgelbüchlein
ou autres : le magnifique CD de Martin Gester par exemple dans Tempéraments
"Tilge, Höchster, meine Sünden" TEM 316020.
Voilà des musiciens courageux, intelligents qui donnent
vie à des musiques qui ne sont pas que des pièces de
virtuosité ou de répertoire original. En matière
d'orgue il est très important de retrouver "l'esprit" des pages
qui ont été écrites par nos prédécesseurs. »
« Je vous
recommande les improvisations de Pierre Cochereau à
Notre-Dame de Paris. Il y a aussi l'intégrale des symphonies de Widor
sur les plus beaux orgues Cavaillé-Coll. »
Marc Monin
« 3 cds d'oeuvres
de Naji Hakim, jouées par lui même à la Trinité et au Sacré Coeur.
Monstrueux, un génie à découvrir de toute urgence.
Il a une technique transcendentale, et ses oeuvres sont magnifiques,
dans un style brillant.
1 cd d'improvisations sur des chants Maronites, par Hakim.
L'improvisateur rejoint le compositeur ! « Beauvarlet-Charpentier,
père et fils : oeuvres pour orgue et percus.
Charmant, et en plus joué à Souvigny, orgue sublimissime. « Trésors de l'orgue en 4 cd
chez RCA : des perles :
Toccata de Widor par Latry à St Eustache, Toccata et Fugue de Bach par
Virgil Fox, Symphonie 3 de Saint-Saens par Munch, Fantaisie de Mozart par
Bouvard, Variations du Veni Creator de Duruflé par Castagnet... »
Yannick Merlin
«
Je vous communique les disques que mon cher professeur Jean Wallet titulaire
de l'orgue de la cathédrale de Nice a réalisés [en 2001].
Ces disque sont présentés sur mon site à l'adresse :
http://nelly.johnson.free.fr/Forum.html.
»
uvres de Frescobaldi et Bach
Orgue de St-Pierre des Carmes au Puy-en-Velay
«
Puis-je me permettre de suggérer l'écoute du tout dernier
enregistrement de Michel Chapuis ? Qui mieux que lui peut faire sonner
le magnifique instrument de K J Riepp de la collégiale de Dole ?
A vrai dire, il y a selon lui trois instruments dans cet orgue. Un visage
français, un visage allemand, un visage romantique. Ces trois visages
font l'objet de trois CD : "Dole, l'orgue aux trois visages" chez Plenum
Vox.
Magnifique, avec des improvisations impressionnantes... »
«
Deux extraits de la discographie de Vincent Genvrin qui me paraissent intéressants
à plus d'un titre : ses deux enregistrements consacrés à
Lefébure-Wély (disques HORTUS n° 004 et 005).
« Prince des organistes » et organiste officiel du Second
Empire, au cur de la vie organistique de son temps, Lefébure est
aujourd'hui trop souvent oublié des interprètes. Il est vrai
que sa musique nous semble souvent bien « légère »,
tant elle est fonctionnelle et ancrée dans son époque - à
l’inverse des uvres géniales et « intemporelles » d’un
César Franck.
L’intérêt des disques de Genvrin est justement d’avoir
cherché à replacer ces pièces d'orgue dans leur contexte,
afin de leur restituer leur véritable dimension historique, liturgique
et musicale. Les uvres choisies sont interprétées sur les
magnifiques instruments de la Madeleine et de Saint Sulpice, et côtoient
avec bonheur tous les éléments sonores qui participaient
au faste des offices de l’époque : cantiques, faux bourdons, motets,
et même les splendides cloches de Saint Sulpice (les plus belles
de Paris !). Cette approche intelligente nous vaut un très beau
voyage dans le temps, à la découverte de l'orgue de Napoléon
III... »